mardi 24 janvier 2012

Nouvelles du front : à Neuilly, hors de question de payer pour les gueux

Ville de Neuilly, région parisienne. La scène se passe aux alentours de la station de métro Pont de Neuilly.
Un groupe d'une bonne centaine de personnes est réunie à l'initiative du DAL (Droit Au Logement) pour protester contre l'enchérissement des loyers et l'incapacité corrélative de se loger pour un nombre plus en plus grand de personnes. Avant cet extrême, la pression du coût du logement sur le revenu des ménages se fait très forte.
Un camion, une cohorte, une fanfare et des banderoles, le tout d'un calme et d'un civisme sans défaut.
Le choix de Neuilly n'était pas innocent : cette ville est en infraction vis-à-vis la réglementation pour n'avoir gréé qu'un nombre de logements sociaux très inférieur aux minimas. Elle préfère à ce titre s'acquitter de l'amende qui en est la conséquence. Construire du logement social ou payerune amende qui permettra d'en construire ailleurs - la logique n'est pas si mauvaise, même si à la base elle enterrine le principe de la "ghettoïsation" contraire à l'esprit républicain (liberté, égalité, fraternité).
Neuilly se veut un ghetto de riches, soit. Mais aujourd'hui elle ne veut même plus s'acquitter de l'amende relative à son trop faible taux de logements sociaux et a déposé un recours pour exonération. Elle ne veut pas participer à l'effort commun pour que tous puissent vivre décemment, elle s'en fout, elle mange bien et dort au chaud, et veut encore manger plus. Si ce n'est pas cracher à la gueule du pauvre, je ne m'y connais pas...

Un groupe de sans-toit, gueux de notre temps, qui vient s'afficher et défiler au sein de cette Neuilly riche, bourgeoise, réactionnaire et cynique... ça ne pouvait pas prendre des proportions trop importantes, il fallait s'en douter. Après une station d'une bonne heure au point de rassemblement, le cortège se met doucement en marche et s'apprête à descendre la contre-allée du boulevard Charles de Gaulle. Il ne fera pas 100 mètres avant d'être stoppé net par un groupe de CRS ; demi-tour les gueux, ne dérangez pas la vieille bourgeoise en fourrure attablée sur la terrasse chauffée de son café favori. Sa morgue latente et son peu de considération pour votre présence physique (elle vous bouscule, la marquise) vous fera comprendre toute la considération qu'elle vous porte. N'attendez pas plus de compréhension des rejetons de sa classe : leur morgue n'est même plus attaquable, imbibés des valeurs de leurs parents ils sont incapables de la démarche critique qui leur permettrait de comprendre pourquoi ces pouilleux (dont beaucoup de noirs en prime, ouh), viennent se geler ici et troubler leur goûter chic du dimanche après-midi.

C'est vrai, quoi, on ne chie pas sur les logements sociaux à Neuilly pour voir leurs habitants potentiels venir défiler sous nos fenêtres ! Faut pas déconner. Qu'ils mangent de la brioche.

Bon et pour finir, comme toute contestation du système symbolique, la manif a eu le droit, post demi-tour, d'aller mourir vers le pont de Neuilly où elle ne serait pas trop visible ni gênante. Cachez cette pauvreté que je ne saurais voir. Le système cache ou récupère.

Pour ma part je m'en suis revenu chez moi en footing comme à l'aller : au chaud, bien logé et en plus propriétaire sans trop d'emprunt pour pondre une dissertation bobo à propos d'une réalité sociale sur laquelle je n'ai aucune prise.

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