vendredi 17 juillet 2009

L'affaire de la télévision contaminée

Nous passons chaque jour en moyenne 3h08 devant notre télévision [1]. C'est colossal. Rarement un média quelconque aura eu une pénétration si intense dans les foyers du monde entier. Une telle omniprésence impose de se poser des questions sur ses effets effectifs sur nos esprit, ceux de nos enfants, et par là sur nos sociétés.
Hors, bien peu de cas est fait par nos états de ces questions. C'est tout juste si récemment a été rejetée l'apparition en France de nouvelles chaînes de télévision pour bébés... à la demande et par la force des arguments d'une organisation. [2]

Plus de 3h par jour est un temps considérable. Cela fait 21h par semaine... cette semaine-ci amputons donc ces 21 heures de quelques unes afin de se pencher un peu plus sur la petite boite à images, et non pas rester devant. ;-)

Comme suite donc au billet "Ces études qui attaquent la télévision", jugé trop politique dans sa conclusion par certains en d'autres lieux, voici une série de références plus directes vers des sources d'information sur l'impact des images télévisuelles, et notamment le documentaire "Le Tube" de L.Mariot. Toutes sont d'ailleurs citées comme sources ou références de l'article.

A charge de l'article précédent, il faut bien reconnaitre que si la sacro-sainte télévision est un outil de prédilection dans la diffusion de l'abrutissement et de l'homogénéisation, l'ensemble des autres média n'est cependant pas en reste non plus : publicité omniprésente dans les lieux publics, journaux, cinéma, web, jeux vidéos...

Il n'en reste pas moins que, de par son mode de fonctionnement (image directe plutôt qu'image projetée), son impact mental particulier indépendamment du contenu (mise en état d'hypnose du cerveau, manque d'extériorité perçue du spectateur vis-à-vis des images, quasi-addiction) en font, au même titre que le web d'ailleurs, un média particulièrement à risque. Quand, de plus, le contenu est standardisé, pauvre et fait la part belle aux publicités subliminales à destination notamment des plus jeunes et plus vulnérables, le risque devient avéré...


Le premier documentaire, Le Tube, de L.Mariot, est cité dans l'article initial et l'on y retrouve une bonne part des développements autour de l'impact de l'image directe de la télévision (par contraste avec l'image projetée).
Il se découpe en 4 parties que vous trouverez ici :

Page d'Arts Industrialis consacrée à la conférence : Société et télévision au XXI siècle
... dont voici quelques vidéos listées ci-dessous :
  • Société et télévision au XXI siècle - Baton-Hervé Elisabeth
    "Ce ne sont pas des programmes qui sont vendus à un public mais un public qui est vendu à des annonceurs."
    Notion de "brouillage et confusion" du discours commercial qui ne se limite pas aux seuls écrans prévus à cet effet : placement de produit et publicité clandestine deviennent la règle. Autre technique à laquelle les enfants sont particulièrement vulnérables, l'exploitation des personnages et héros de dessins animés dans des publicités, jouant ainsi sur le capital affectif envers un personnage fictif pour le dévoyer vers une marque, un produit, un certain comportement.
    Raccourcissement ou suppression des génériques : la fonction de séparation de ce dernier (entre fictif et réel, entre les différentes émissions, sa fonction d'identification et de transition entre deux émissions) disparaissent, ajoutant à la confusion.
    Suggestion de styles de vie ou de manières à adopter, comme par exemple lorsque la consommation (le consumérisme) constitue la toile de fond et le cadre d'émissions comme les dessins animés, inculquant ainsi les "bonnes manières" à adopter. Où est le libre arbitre ?
    Autres griefs : manque de diversité de forme, de sujet, de contenu, très peu de stimulation de l'imaginaire, et des programmes axés sur la consommation ne permettant pas de satisfaire au plein développement intellectuel de l'enfant. "Ce type de télévision n'apprend pas à penser, mais apprend à dépenser."
    La maîtrise des parents, normalement là pour dénouer les situation dans leur rôle explicatif, est dépassée : que peuvent-ils face à des professionnels équipés pour contourner, dépasser leurs contrôle ? Que peuvent-ils lorsque le contenu est subliminal et qu'ils n'en ont donc pas eux-mêmes conscience ?

    Conclusion : il faut œuvrer pour une télévision de qualité et diversité pour tous les publics. Note de la rédaction : cette dernière restant asservie aux intérêts capitalistes dans le cadre de la société de consommation, ce n'est pas gagné...

  • Société et télévision au XXI siècle - Roland Gori
    Roland Gori est psychanalyste. Il décortique dans cette conférence les mécanismes de la servitude volontaire dans nos démocraties consuméristes; il intervient au nom du collectif "Pas de zéro de conduite". Cette intervention constitue une base psychologique et sociologique qui étaye le reste des conférences. Le discours est un peu "technique", un peu de concentration s'impose.
    "Le goût des nouvelles servitudes.", ainsi s'intitule l'intervention ;
    "Un comportementalisme régnant sans partage sur les politiques de santé publique au neuro-marketing, la neuro-économie s’impose aux individus et aux groupes comme la nouvelle norme. C’est dans ce contexte qu’il faut appréhender le rôle que ce nouveau paradigme fait
    jouer à la télévision, les perturbations qui en résultent, et le système de contrôle qu’elle forme parallèlement à la médicalisation généralisée des existences."

  • Société et télévision au XXI sciècle - Bernard Stiegler
    "La télévision, en même temps qu’elle devenait la principale technologie par laquelle le marché tente de plier les comportements individuels et collectifs à ses intérêts, est aussi devenue le principal dispositif social de construction des individus psychiques et des groupes. Elle a ainsi permis de soumettre le devenir social au marketing. Le débat ouvert par l’apparition de la chaîne de télévision Baby First visant à capter l’attention des tout petits enfants et la délibération adoptée par le CSA le 22 juillet 2008 à la suite de la mobilisation de personnalités et d’institutions diverses ont mis en évidence que la télévision pose un problème de santé publique qui ne concerne pas que les bébés. Cette intervention tentera d’esquisser une typologie des principales pathologies sociales aujourd’hui induites par la télévision.
    "

Et d'autres parties encore, s'étalant sur toute une journée de colloque, toutes listées et disponibles sur la page dédiée.


Un article dans Le Monde Diplomatique :
  • Le désir asphyxié, ou comment l’industrie culturelle détruit l’individu, par Bernard Stiegler, intervenant
    "Le capitalisme hyperindustriel a développé ses techniques au point que, chaque jour, des millions de personnes sont connectées simultanément aux mêmes programmes de télévision, de radio ou de consoles de jeu. La consommation culturelle, méthodiquement massifiée, n’est pas sans conséquences sur le désir et les consciences. L’illusion du triomphe de l’individu s’estompe, alors que les menaces se précisent contre les capacités intellectuelles, affectives et esthétiques de l’humanité."



Au-delà de la conférence et de l'article :


[1] Moyenne mondiale
[2] E.g. http://wikiwix.com/cache/?url=http://www.collectifciem.org/spip.php?article107

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